Campagne 2025 : le blé BIO français face au défi de la qualité

July 1, 2025
Analyse de marché BIO

🔍 État du marché du blé BIO – Juillet 2025

Les dernières semaines ont été marquées par une intensification de l’activité sur le marché du blé BIO, alors que les acteurs intègrent progressivement les données prévisionnelles de la récolte 2025. Après une campagne 2024 historiquement basse (204 000 T récoltées contre 360 000 T attendues cette année, soit +80 %), la dynamique est nettement haussière en termes de volumes. Les rendements passent de 2,40 t/ha à 3,35 t/ha, et les surfaces semées progressent de 30 %. Mais cette abondance ne résout pas tous les déséquilibres. La météo capricieuse compromet la qualité sanitaire et protéique du grain. Malgré la hausse des disponibilités, les stocks de fin de campagne resteront relativement bas en deçà des 20 000 T (contre 73 000 T en 2024 et 136 000 T en 2023).

Le marché se réoriente donc vers l’export (45 000 T attendues, contre seulement 8 250 T en R24), et la consommation intérieure progresse également : +18 % pour les meuniers (218 000 T) et + 4 % pour la FAB (95 000 T). Les importations, quant à elles sont prévues en net recul (-41 %). Le marché reste néanmoins sous tension, avec des volumes à écouler plus difficiles à placer dans un contexte d’offre abondante.

📈 Facteurs haussiers

1. Qualité potentiellement différenciée malgré la pression climatique

Même si la météo actuelle soulève des inquiétudes sur les niveaux de protéines, certaines zones de production conservent un bon potentiel qualitatif. Une partie du blé BIO pourrait ainsi se démarquer par des critères supérieurs aux standards minimums, notamment en protéines ou en taux de chute de Hagberg. Cette qualité différenciée pourrait trouver preneur auprès des meuniers premium, maintenant une demande soutenue sur certains lots.

2. Reprise de la compétitivité à l’export dans le nord de l’UE

Avec un prix fourrager autour de 310–320 €/t départ, la France redevient compétitive pour les débouchés en Allemagne, au Bénélux ou en Scandinavie. Les volumes exportables s'estiment à 45 000 T contre moins de 10 000T en 2024, signalant un retour des acheteurs étrangers. Cette dynamique offre une soupape de sécurité au marché français en absorbant une partie de l’offre excédentaire.

3. Consommation intérieure en nette hausse

Les industriels se montrent plus présents : la demande meunière augmente de près de 18% par rapport à la campagne précédente (215 000 T vs 182 000 T) et la FAB progresse aussi, à 95 000 T (+4 à 5 %). Cette dynamique traduit une meilleure acceptabilité des prix BIO dans les filières aval et soutient les fondamentaux du marché, en particulier sur les segments de qualité supérieure.

📉 Facteurs baissiers

1. Des volumes disponibles très élevés en 2025

La production prévue à 360000 T représente une hausse importante de près de +80%. Le rebond et les rendements élevés (3,35 t/ha), alimentent des tensions sur les débouchés, en particulier pour les blés à usage fourrager. La pression à la vente s’intensifie dans plusieurs régions, notamment en Centre-Val de Loire et Grand Est, où les opérateurs peinent à commercialiser l’ensemble de leur offre.

2. Risque de repli de qualité sanitaire et protéique

Les conditions climatiques ont accéléré les maturations et risquent d’entraîner des niveaux de protéines inférieurs aux exigences des meuniers (notamment les blés 11/76/220). Une partie de la récolte pourrait basculer en usage fourrager, entraînant une pression supplémentaire sur cette gamme de prix et réduisant l’opportunité de valorisation pour certains producteurs.

3. Persistance des importations espagnoles à bas prix

Malgré la baisse estimée des importations, l’Espagne reste un acteur très concurrentiel sur le marché BIO. Certains blés espagnols, en provenance de zones irriguées, arrivent avec un bon niveau de qualité et à prix compétitif, mettant sous pression les prix de certains segments, notamment dans le sud ouest de la France.

📊 Sentiment de marché

Le marché du blé BIO annonce une tension à court terme, avec une forte disponibilité mais des débouchés de qualité encore incertains. Le retour de volumes à l’export est une bonne nouvelle, mais les niveaux de qualité réels conditionneront fortement la valorisation. La segmentation se renforce entre un blé fourrager qui se négocie actuellement entre 310 et 320 €/t départ, et un blé meunier type 11/76/220 qui peut atteindre 390 à 420 €/t départ selon les lots et les régions.

Toutefois, les faibles stocks de report et la demande intérieure soutenue offrent un socle relativement solide. Le marché pourrait évoluer en deux vitesses, avec des tensions haussières sur les blés qualitatifs et une stabilité, voire une légère baisse, sur les fourragers. À surveiller : la réaction des acheteurs à la rentrée et la tenue des marchés BIO à l’export, notamment en Allemagne et en Scandinavie.

Marius Juvecior
Auteur
Marius Juvecior

Marius est notre spécialiste des marchés des céréales biologiques. Il supervise la commercialisation des productions de nos clients agriculteurs, tant auprès des industriels français qu'à l'export. Issu du monde agricole, il possède une expertise approfondie des conditions de production des cultures biologiques. Franco-Roumain, il maîtrise le roumain, l’anglais et l’espagnol, ce qui lui permet d’intervenir à l’échelle européenne et d’anticiper les dynamiques du marché en suivant de près l’évolution des flux commerciaux.

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