+5 % sur les rendements attendus en Europe : le marché du blé sous pression

June 24, 2025
Analyse de marché

🔍 Contexte général du marché

Le marché du blé meunier reste extrêmement sensible aux ajustements météorologiques et aux flux mondiaux d’exportation. En ce début d’été 2025, les cours sont soumis à une forte volatilité, tiraillés entre des prévisions de récolte favorables en Europe et des incertitudes géopolitiques et climatiques à l’international. Le rapport MARS de la Commission européenne rehausse les perspectives de rendements dans l’UE, tandis que la Russie et l’Ukraine continuent d’affiner leurs estimations.

Sur le plan monétaire, le renforcement de l’euro face au dollar pèse sur la compétitivité des origines européennes. En parallèle, la demande mondiale montre des signaux mitigés, avec une baisse des achats égyptiens et quelques achats ciblés comme ceux d’Oman. Ce contexte engendre un climat baissier sur les places boursières, bien que quelques tensions sur les disponibilités puissent encore faire rebondir les cours.

📉 Évolution récente des cours

Entre le 20 et le 23 juin, les cours du blé meunier sur Euronext ont reculé de 4 €/T sur l’échéance septembre et de 3,50 €/T sur décembre. Cette baisse est principalement attribuée aux bonnes perspectives de récolte en Europe, mises en avant dans le rapport MARS de la Commission européenne. Le rendement moyen du blé tendre est désormais estimé à 6,08 T/ha, soit +5 % par rapport à la moyenne quinquennale. Cette dynamique haussière de la production est particulièrement notable en Espagne, Grèce, pays baltes, Roumanie et Bulgarie.

À l’international, le blé de la mer Noire conserve sa compétitivité, illustrée par un achat d’Oman de 110 000 T de blé russe. Du côté des importateurs, l’Égypte affiche un recul de 30 % de ses importations de blé depuis début 2025, ce qui alourdit encore la pression sur les prix. La remontée de l’euro face au dollar accentue également cette tendance baissière, tout comme le recul du pétrole consécutif à des signaux de détente géopolitique au Moyen-Orient.

📊 Facteurs haussiers

1. Stress hydrique dans certains bassins méditerranéens et en mer Noire

Plusieurs régions traditionnellement productrices ou importatrices de blé, telles que l’est de l’Ukraine, la Turquie, le Maroc et l’ouest de l’Algérie, sont confrontées à un déficit hydrique persistant. Ces conditions climatiques, bien que localisées, pourraient affecter les disponibilités locales et renforcer la demande à l’importation dans ces zones. Même si leur impact immédiat reste limité au niveau mondial, ces tensions régionales contribuent à entretenir une forme de vigilance sur les marchés et soutiennent légèrement les prix face à un contexte global plutôt excédentaire.

2. Retard de la récolte et incertitudes météorologiques aux États-Unis

Aux États-Unis, seuls 19 % du blé d’hiver a été récolté, contre 38 % à la même période l’an dernier. Ce retard, couplé à une baisse des cultures jugées « bonnes à excellentes » en blé de printemps (54 % contre 57 % la semaine précédente), alimente les spéculations d’un resserrement de l’offre américaine, un facteur potentiellement haussier pour les marchés internationaux.

3. Demande active au Moyen-Orient et initiatives russes

L’achat de 110 000 T de blé russe par Oman pour renforcer sa réserve stratégique, ainsi que l’initiative de création d’une plateforme commerciale dédiée au blé dans le Golfe Persique par la Russie, témoignent d’une demande soutenue dans cette région. Ces initiatives pourraient stabiliser ou même relancer certains flux d’exportation.

📉 Facteurs baissiers

1. Amélioration des rendements en Europe (rapport MARS)

Le rendement moyen du blé tendre en Europe est désormais estimé à 6,08 T/ha, en légère hausse par rapport au mois dernier, et nettement supérieur à la moyenne quinquennale (+5 %). Les conditions climatiques favorables en Europe du Sud et de l’Est soutiennent cette révision à la hausse, induisant une perspective de récolte abondante.

2. Contraction de la demande égyptienne

L’Égypte, premier acheteur mondial, a réduit ses importations de blé de 30 % depuis le début de l’année par rapport à 2024. Ce net ralentissement des achats impacte la demande globale et réduit les tensions sur les disponibilités mondiales, ce qui exerce une pression supplémentaire sur les prix.

3. Hausse de l’euro face au dollar

L’euro s’échange désormais au-dessus de 1,16 $, son plus haut niveau depuis fin 2021. Ce renforcement réduit la compétitivité des céréales européennes sur les marchés mondiaux, rendant les origines UE moins attractives pour les acheteurs internationaux. Ce facteur monétaire amplifie la pression baissière sur les cours.

🧭 Sentiment de marché et perspectives de prix

Le marché du blé meunier évolue dans un environnement marqué par un excès d’offre anticipé en Europe et une baisse de la demande dans les pays importateurs clés, notamment en Afrique du Nord. Les achats ponctuels dans le Golfe ou les tensions régionales ne suffisent pas pour inverser cette dynamique.

Le contexte climatique global reste à surveiller, notamment dans la mer Noire et aux États-Unis, mais à court terme, les fondamentaux orientent vers une pression baissière. À cela s’ajoute l’effet du change défavorable, accentué par la remontée de l’euro. Dans ce contexte, notre sentiment est modérément baissier pour les semaines à venir. La fourchette de prix envisagée sur Euronext sur échéance Décembre se situe entre 215 et 225 €/T, avec des risques à la baisse si la moisson européenne confirme les bons rendements estimés.

Damien Pierre
Auteur
Damien Pierre

Je suis Damien Pierre, cofondateur de Delivagri. Je suis passionné par l'agriculture depuis mes études réalisées à l'ESA d'Angers. Sur ce blog, j'essayerai de vous partager ma vision de l'agriculture et les solutions que j'identifie pour apporter de la valeur ajoutée auprès des producteurs peu importe leurs choix d'agricultures.

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