Export de blé : un marché dynamique avec 14,7Mt attendues mais des prix insuffisants
🔍 État actuel du marché
Le marché des céréales à paille traverse une période complexe. Sur le MATIF, les cours du blé oscillent autour de 190 €/t. Après avoir brièvement testé un plancher sous ce seuil, un léger rebond a été observé, mais sans dynamisme. Ce niveau reste largement en dessous des coûts de revient pour les producteurs français. Sur le marché physique, l’exportation offre une bouffée d’air : la prime rendue Rouen atteint ponctuellement +3 €/t, traduisant une demande solide à l'international. FranceAgriMer prévoit une exportation de 14,7 Mt sur la campagne 2025/26, en hausse de +41 % par rapport à l’an dernier, sur fond d’un stock de report important (4 Mt). Ce rebond à l’export est favorisé par la lenteur des embarquements depuis la mer Noire, notamment en Russie et en Ukraine, pénalisées par des politiques douanières et des conditions logistiques difficiles. Néanmoins, l’abondance de l’offre mondiale pèse sur les prix. La France affiche une récolte de blé de 33,1 Mt (+29 %), et la Russie anticipe 135 Mt de grains. Dans ce contexte, les producteurs adoptent une gestion prudente, étalant les ventes pour sécuriser des prix moyens.
📈 Facteurs haussiers
Rebond de l’exportation française (+41 % estimé sur un an)
Le marché à l’export est particulièrement actif. FranceAgriMer anticipe un volume de 14,7 Mt de blé exporté en 2025/26, contre 10,4 Mt l’an passé, soit une hausse de 41 %. Cette dynamique repose notamment sur des primes rendues Rouen positives pouvant atteindre +3 €/t. La compétitivité française sur les marchés internationaux (notamment en Afrique du Nord et au Moyen-Orient) compense partiellement la faiblesse des prix sur Euronext. Cette demande permet d’écouler la forte production nationale et pourrait soutenir légèrement les cours à moyen terme.
Campagne d’exportation lente en mer Noire
La Russie et l’Ukraine, principaux concurrents à l’export, connaissent un début de campagne timide. En Ukraine, les exportations sont estimées à 16 Mt contre 18 Mt l’an dernier, en raison de retards de récolte et de difficultés logistiques. En Russie, des taxes à l’exportation sont envisagées et les priorités économiques se concentrent davantage sur la défense que sur les exportations agricoles. Cette situation limite l’offre sur le marché mondial, renforçant mécaniquement la compétitivité des origines européennes.
Réactions techniques haussières sur les marchés américains
Aux États-Unis, les cours du maïs et du soja sont soutenus par l’espoir d’un nouvel accord commercial avec la Chine. Le CBOT entraîne par sympathie les cours européens, bien que de manière plus mesurée sur le blé. Le maïs sur Euronext a par exemple gagné jusqu’à 2 €/t en une journée. Si les achats chinois se confirment, cela pourrait réorienter une partie de la demande mondiale vers d’autres cultures et desserrer la pression sur le blé.
📉 Facteurs baissiers
Forte production française et stocks élevés
La récolte de blé français est estimée à 33,1 Mt pour la campagne 2025/26, en hausse de 29 % par rapport à l’année précédente. À cela s’ajoutent 4 Mt de stocks de report. Cette abondance crée une pression importante sur les prix. Même avec un bon niveau d’export, le surplus reste conséquent, ce qui freine tout mouvement haussier durable, notamment tant que l’Europe de l’Ouest ne voit pas de tension logistique ou climatique.
Récoltes record à l’échelle mondiale
La Russie, malgré un début de campagne lent, table sur 135 Mt de grains (poids net), tandis que l’Australie annonce 35,7 Mt de blé, et l’Argentine se prépare à une récolte abondante. Ces volumes s’ajoutent à l’offre mondiale déjà excédentaire et renforcent la pression concurrentielle à l’export, limitant les marges de manœuvre pour les opérateurs français sur les marchés internationaux.
Manque de soutien sur le MATIF et ventes techniques
Le marché à terme européen peine à trouver un soutien technique. Les cours ont reculé sur les échéances décembre (-1,25 €/t) et mars (-0,75 €/t) sous l’effet de ventes techniques. Ce manque de volatilité empêche les producteurs de bénéficier d'opportunités haussières. Le marché semble intégrer la majorité des fondamentaux déjà connus, laissant peu de place à un rebond spéculatif dans l’immédiat.
📊 Notre sentiment de marché
Le marché des céréales à paille est à ce jour neutre à baissier. Les prix stagnent autour de 190 €/t sur le blé Euronext, niveau structurellement insuffisant pour couvrir les coûts de production. En l’absence de catalyseur fort, la tendance reste molle. La situation mondiale est caractérisée par une offre excédentaire malgré un regain d’activité à l’export pour la France. Cette dynamique exportatrice permet d’atténuer la chute des prix, sans pour autant inverser la tendance. Le marché attend des signaux nouveaux : tensions géopolitiques, aléas climatiques dans l’hémisphère Sud, ou retournement macroéconomique.
En attendant, la prudence domine chez les agriculteurs et la stratégie du "bon père de famille", consistant à saucissonner les ventes tout au long de la campagne, semble la plus adaptée. Elle permet de lisser le risque, de se prémunir contre une éventuelle rechute (le prix pourrait perdre encore 10 à 20 €/t), tout en gardant une marge de manœuvre en cas de rebond.
Plage de prix anticipée : 180 à 195 €/t à court terme.



