Engrais minéraux : la dynamique haussière se confirme

October 31, 2025
Analyse de marché

🔍 État actuel du marché

Le marché des engrais minéraux en France et en Europe traverse une phase d’intense activité. Tiré par des facteurs à la fois réglementaires, logistiques et géopolitiques, le complexe azoté est le plus affecté, avec des hausses de prix significatives constatées sur l’urée, l’ammonitrate et la solution azotée. La crainte liée à l'entrée en vigueur du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF), la restriction des volumes disponibles et les perturbations sur certaines unités de production mondiales alimentent un climat de tension. Dans ce contexte, la demande des agriculteurs, restée prudente en début de campagne, s’accélère brutalement, créant une pression supplémentaire sur les prix et les délais d’approvisionnement. Cette conjoncture appelle à une vigilance particulière dans les décisions d’achat.

📈 Facteurs haussiers

1. Anticipation de la taxe MACF (mécanisme d'ajustement carbone aux frontières)

La perspective du maintien de la taxe MACF dès 2026 incite les distributeurs et les exploitants à accélérer leurs achats. Ce mécanisme carbone, destiné à aligner les importations sur les standards européens d’émission, renchérit potentiellement le coût des engrais extracommunautaires. Cette incertitude génère une forte demande anticipée, notamment sur les produits azotés. Ainsi, la solution azotée a progressé de 35 €/t en deux semaines, et l’urée a bondi de 60 $/t sur les marchés nord-africains.

2. Tensions logistiques et limitations d’offre des producteurs

Les producteurs européens, conscients de la tension sur le marché, limitent volontairement leurs mises à disposition. Chaque nouvelle allocation s’accompagne de hausses tarifaires. Certains importateurs, confrontés à un manque de capacités logistiques et d'incertitudes réglementaires, ne proposent plus de volumes avant fin décembre. Ce déséquilibre entre l’offre et la demande accentue la pression haussière sur les prix, notamment sur la solution azotée et l’ammonitrate.

3. Arrêt de production d’ammoniac chez Nutrien à Trinité

Quatre usines de Nutrien, situées à Trinité, ont cessé leur production de manière imprévue. Cela retire 85 000 tonnes/mois du marché mondial d’ammoniac. Ce composant, essentiel dans la fabrication d’engrais azotés, voit son prix grimper à 625 $/t FOB Algérie. Cette situation pèse sur l’ensemble de la chaîne de valeur et pourrait entraîner des hausses supplémentaires dans les semaines à venir si la situation persiste.

📉 Facteurs baissiers

1. Demande hésitante sur les nitrates et le sulfate d’ammonium

Contrairement à l’urée ou à la solution azotée, le marché des nitrates reste calme. Le Brésil est en basse saison et la demande européenne, bien que présente, n’est pas suffisamment soutenue pour justifier les hausses décidées par les producteurs. Le sulfate d’ammonium suit une dynamique similaire, en attente d’un arbitrage des acheteurs brésiliens. Ce manque de dynamisme pourrait freiner l’ascension des prix sur ces segments.

2. Stabilité des prix du gaz naturel en Europe

Malgré les tensions sur les marchés de l’énergie, le prix du gaz naturel européen est resté stable autour de 32 €/MWh. Les stocks de l’UE sont remplis à plus de 83 %, et les approvisionnements via le GNL et la Norvège sont robustes. Ce contexte réduit les risques de flambée des coûts de production pour les engrais azotés, ce qui pourrait ralentir ou stabiliser la hausse des prix si la tendance perdure.

3. Correction possible de l’urée selon la demande indienne

L’Inde, acteur clé du marché de l’urée, cherche à sécuriser 2 millions de tonnes via un appel d’offres. Si elle parvient à en importer une large part rapidement, une pause dans la demande mondiale pourrait entraîner une correction baissière. À l’inverse, un échec à atteindre ses objectifs pourrait soutenir encore davantage les prix. La situation reste donc incertaine mais potentiellement stabilisatrice à court terme.

📊 Notre sentiment de marché

Le sentiment dominant est nettement haussier sur l’ensemble du marché des engrais minéraux, en particulier les produits azotés. La combinaison d’une forte demande européenne, de contraintes logistiques, de risques réglementaires (taxe MACF) et de tensions sur les matières premières crée un environnement propice à une poursuite de la hausse des prix. Même si quelques signaux de modération apparaissent sur les nitrates et le sulfate d’ammonium, ils restent insuffisants pour inverser la tendance générale.

Dans ce contexte, il est recommandé de sécuriser des volumes rapidement, notamment pour les exploitants encore découverts, afin de limiter leur exposition à de nouvelles hausses ou à des ruptures d’approvisionnement.

Plages de prix estimées à court terme :

  • Solution azotée : 340-370 €/t départ Rouen
  • Urée : 450-480 €/t vrac départ La Pallice
  • Ammonitrate 33,5 : 480-490 €/t rendu
  • Ammonitrate 27 : 390-410 €/t rendu
  • DAP : 750 €/t vrac départ Rouen
  • TSP 45 : 580-610 €/t vrac départ Rouen
  • Potasse (KCl) : 370-375 €/t vrac départ Rouen

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