Marché céréalier : l’équilibre fragile entre offre mondiale et ralentissement de la demande
🔍 Évolution récente du marché
Au cours des derniers jours, les marchés céréaliers ont évolué dans un contexte contrasté entre fondamentaux internationaux et pression macroéconomique. En France, les cours du blé meunier ont reculé de 1,75 €/t entre le 31 juillet et le 1er août sur Euronext, impactés par la hausse de l’euro face au dollar et une pression persistante des offres mondiales.
Le maïs, quant à lui, a connu une évolution plus hésitante, avec une baisse sur les échéances proches et une légère hausse sur juin. Aux États-Unis, les prix ont poursuivi leur repli, avec des niveaux bas historiques : le maïs décembre 2025 est tombé sous 4,10 $/bu, et le blé décembre sous 5,35 $/bu. Ce mouvement est renforcé par les bonnes conditions météorologiques, une offre abondante (notamment au Brésil), et une demande internationale atone.
En Ukraine, les exportations céréalières de juillet 2025 (maïs à 643 000 t contre 1,511 Mt en 2024) confirment un retard notable, tandis qu’en Russie, SovEcon a de nouveau abaissé ses prévisions de récolte. Enfin, les tensions commerciales initiées par les États-Unis continuent de créer de l’incertitude, notamment sur les flux d’échanges agricoles internationaux.
📈 Facteurs haussiers
Retard des exportations ukrainiennes
Les exportations céréalières ukrainiennes ont été fortement ralenties en juillet 2025 : -55 % pour le maïs (643 000 t contre 1,511 Mt en 2024), -47 % pour l’orge et arrêt total pour le seigle. Cette baisse s’explique par un début de récolte perturbé et une logistique portuaire ralentie, aggravée par des conditions météorologiques difficiles. Cela limite l’offre disponible sur le marché mondial en ce début de campagne, soutenant mécaniquement les prix, notamment en Europe où l’Ukraine reste un concurrent majeur.
Dépréciation récente de l’euro
La dépréciation de l’euro observée la semaine dernière, bien que partiellement corrigée depuis, a offert un regain de compétitivité aux céréales européennes à l’export. Ce mouvement monétaire favorise les origines françaises et allemandes, notamment sur les appels d’offres en Afrique du Nord et au Moyen-Orient. Une évolution de l’euro autour de 1,14 $ voire en dessous pourrait permettre un soutien aux prix Euronext dans les prochaines semaines.
Révision à la baisse de la récolte de blé russe
SovEcon a abaissé sa prévision de récolte de blé en Russie à 83,3 Mt (contre 83,6 Mt auparavant), en raison de conditions climatiques peu favorables. La Russie étant le premier exportateur mondial, toute révision à la baisse de sa récolte pèse sur les perspectives d’exportations globales et renforce la pression haussière sur les prix, surtout dans un contexte d'engorgement des ports australiens et de demande incertaine côté Chine.
📉 Facteurs baissiers
Offres mondiales abondantes
La production de la deuxième récolte de maïs au Brésil est révisée à la hausse par StoneX à 111,7 Mt (+3,2 %). En parallèle, les conditions de culture du maïs américain sont bonnes à excellentes sur 73 % des surfaces, selon l’USDA. L’Argentine affiche également des conditions très favorables pour son blé. Ces éléments renforcent l’idée d’une campagne 2025/26 surabondante, surtout pour le maïs, pesant durablement sur les cours mondiaux.
Repli de la demande chinoise
La Chine, premier importateur mondial, revoit fortement à la baisse ses besoins en maïs pour la campagne 2025/26 : 5,1 Mt estimées par la JCI contre 10 Mt précédemment anticipés par l’USDA. Cette réduction drastique crée un excédent d’offre au niveau mondial, difficile à réorienter, particulièrement dans un contexte de tensions commerciales croissantes avec les États-Unis.
Pressions macroéconomiques et taux d’intérêt élevés
Le contexte économique mondial reste tendu : recul du moral des investisseurs en zone euro, incertitude politique aux États-Unis, et hausse des taux d’intérêt. Ces éléments pèsent sur la demande finale et les capacités de financement logistique et commerciale. À cela s’ajoute une volatilité croissante du dollar, qui limite les gains sur les marchés à terme américains et freine les positions spéculatives longues sur les commodités agricoles.
📊 Notre sentiment de marché
Le marché des céréales conventionnelles reste sous pression mais présente des signaux d’équilibre à court terme. La faiblesse structurelle de la demande internationale, accentuée par la retenue de la Chine et les tensions commerciales imposées par les États-Unis, rend difficile toute reprise nette des cours. Toutefois, la conjoncture logistique en mer Noire (Ukraine) et la météo incertaine sur certaines zones européennes pourraient limiter le potentiel baissier.
Sur Euronext, le blé septembre 2025 évolue autour de 197 €/t, tandis que le maïs novembre 2025 teste les 193 €/t, proches des plus bas depuis mars 2024. Ces niveaux pourraient constituer un plancher technique si aucune surprise baissière n’intervient à court terme.
À l’international, les cours du blé CBOT décembre restent proches des 5,30 $/bu, avec un support identifié autour de 5,20 $/bu. Le maïs, lui, reste vulnérable sous 4,10 $/bu, mais les achats chinois ponctuels ou des incidents climatiques en Europe pourraient changer la donne.
À horizon 2-4 semaines, une stabilisation des prix est attendue, dans une fourchette de 190 à 200 €/t pour le blé Euronext et 185 à 195 €/t pour le maïs, sauf retournement météorologique ou géopolitique majeur.