Blé tendre : une dynamique prudente en période de transition

July 7, 2025
Analyse de marché

🔍 État récent du marché

La semaine passée a été marquée par une certaine léthargie sur le marché du blé tendre, en grande partie due à la fermeture du marché américain pour la fête nationale du 4 juillet. En France, les pluies survenues le week-end dernier ont temporairement ralenti la moisson dans les deux tiers nord du pays, tandis qu’elle touche à sa fin dans les régions les plus précoces. Sur Euronext, le contrat blé Septembre 2025 a perdu -1,50 €/t vendredi, clôturant à 195,75 €/t, une baisse qui s’ajoute à une ambiance globalement morose sur les marchés physiques.

En parallèle, l’état des cultures de blé tendre en France continue de se dégrader légèrement : 67 % sont désormais jugés en « bon à très bon état » selon FranceAgriMer, contre 68 % une semaine plus tôt. À l’international, les perspectives commerciales restent incertaines, notamment après l’annonce surprise de la suppression de la taxe à l’exportation du blé par la Russie, et l’augmentation par l’UE de ses quotas d’importation de blé ukrainien. Si les fondamentaux de récolte jouent une pression baissière, la réticence des producteurs français à vendre tempère légèrement les baisses.

📈 Facteurs haussiers

1. Météo défavorable dans les principales zones de production mondiale

Les conditions météorologiques inquiètent sur plusieurs fronts. En Russie, les premiers retours sur la récolte dans le sud (Rostov, Krasnodar) indiquent des rendements inférieurs à l’an passé. Dans l’Union européenne et aux États-Unis, une météo capricieuse suscite également des craintes pour le potentiel de production. Cette incertitude sur l’offre mondiale pourrait limiter la baisse des cours et soutenir les prix dans les semaines à venir.

2. Rétention des producteurs français

En France, la pression de la moisson aurait pu fortement peser sur les prix, mais la rétention à la vente de la part des producteurs limite l’offre disponible sur le marché. Ce comportement, motivé par l’attente de prix plus rémunérateurs et par des besoins de trésorerie moins urgents que les années précédentes, crée un effet de soutien temporaire sur le Matif.

3. Dégradation de l’état des cultures françaises

FranceAgriMer a noté une légère baisse de la qualité des cultures de blé tendre : 67 % sont notées en « bon à très bon état » contre 68 % une semaine auparavant, et 58 % l’an passé à la même époque. Bien que la situation reste globalement correcte, cette tendance déclinante maintient une forme d’inquiétude latente sur les volumes finaux disponibles à l’export.

📉 Facteurs baissiers

1. Suppression de la taxe à l’exportation russe

Le gouvernement russe a annoncé la suppression totale de la taxe à l’exportation sur le blé à compter du 9 juillet. Cette mesure, en place depuis 2021, avait pour but de limiter les flux sortants et stabiliser les prix domestiques. Son retrait accroît la compétitivité du blé russe à l’export et met directement sous pression les prix français, notamment sur les destinations Afrique du Nord et Moyen-Orient.

2. Pression récolte dans l’hémisphère Nord

La moisson bat son plein en Europe et va s’accélérer aux États-Unis. Cette période est traditionnellement une phase de forte pression baissière saisonnière, en raison de l’afflux de volumes sur les marchés physiques. La qualité généralement correcte du blé européen à ce stade ne pousse pas les acheteurs à se précipiter, ce qui pèse davantage sur les prix.

3. Hausse des quotas d’importation ukrainiens dans l’UE

L’Union européenne a relevé ses quotas d’importation de blé ukrainien de 1,0 à 1,3 Mt dans le cadre d’un accord commercial révisé. Cette décision renforce la pression concurrentielle sur les céréales françaises, déjà fragilisées par la compétitivité russe. Ce volume supplémentaire d’origine mer Noire, sans droits de douane, accentue la pression sur le marché européen et pourrait limiter les opportunités à l’export pour le blé français.

📊 Notre sentiment de marché

Le marché du blé tendre demeure fragilisé par un faisceau de facteurs baissiers dominants. La dynamique actuelle reste modérément orientée à la baisse, dans un contexte de récolte active et d’une concurrence internationale féroce. Néanmoins, plusieurs signaux de soutien émergent : la dégradation des conditions de culture dans plusieurs pays clés et la rétention commerciale des producteurs français agissent comme des freins à la dépréciation rapide des prix. La suppression de la taxe russe devrait toutefois peser durablement, en renforçant l’offre concurrente sur les marchés traditionnels du blé français.

Dans ce contexte, nous estimons que les prix sur l’échéance Septembre 2025 sur Euronext pourraient osciller entre 190 €/t et 200 €/t à court terme, sauf événement climatique majeur ou surprise commerciale. Une consolidation autour de 195 €/t semble probable dans les jours à venir, avec une volatilité accrue en lien avec les ajustements post-moisson.

Damien Pierre
Auteur
Damien Pierre

Je suis Damien Pierre, cofondateur de Delivagri. Je suis passionné par l'agriculture depuis mes études réalisées à l'ESA d'Angers. Sur ce blog, j'essayerai de vous partager ma vision de l'agriculture et les solutions que j'identifie pour apporter de la valeur ajoutée auprès des producteurs peu importe leurs choix d'agricultures.

Articles similaires