Dynamique contrastée cette semaine à l'approche du prochain rapport USDA (10 avril)

April 9, 2025
Analyse de marché

🔎 Résumé de la situation récente

Les marchés céréaliers mondiaux ont connu une dynamique contrastée cette semaine. Sur le marché du blé meunier, les prix sur Euronext ont progressé entre le 4 et le 7 avril, franchissant à nouveau la barre des 215 €/t. Cette évolution haussière est soutenue par une sécheresse persistante en Europe, notamment en France, qui fait craindre un impact sur les rendements de la prochaine récolte. En parallèle, les conditions de sortie d’hiver restent favorables sur le pourtour de la mer Noire, ce qui pourrait stabiliser l’offre globale.

À l’international, la Jordanie a acheté 60 000 tonnes de blé dur à un prix compris entre 264 $ et 275 $/t, et la Corée du Sud, 65 000 tonnes de blé fourrager à 263,49 $/t C&F. Ces achats témoignent d’un maintien de la demande en dépit d’un contexte géopolitique tendu. Les stocks mondiaux de blé sont estimés à 287,10 Mt (StoneX), en léger recul par rapport à mars. Les tensions commerciales, notamment entre les États-Unis, la Chine et l’Europe, alimentent l’incertitude et freinent la prise de position claire sur les marchés. Le sentiment reste stable mais prudent.

📈 Facteurs haussiers

1. Sécheresse des sols en Europe

La persistance de conditions sèches sur une grande partie de l’Europe, et notamment en France, alimente les craintes sur les rendements futurs. Les prévisions météo pour les jours à venir ne montrent pas d'amélioration significative, ce qui pourrait affecter le développement des cultures de blé tendre. Cette situation pousse les opérateurs à sécuriser leurs achats, soutenant ainsi les cours sur Euronext. En particulier, la hausse enregistrée de +2,75 €/t sur l’échéance mai et +3,25 €/t sur septembre 2025 reflète cette nervosité.

2. Demande internationale active

Malgré le climat d'incertitude géopolitique, certains pays importateurs stratégiques continuent d’acheter. La Jordanie et la Corée du Sud ont lancé et conclu des appels d’offres sur environ 125 000 tonnes cumulées, à des niveaux de prix relativement élevés. Cela traduit une demande ferme pour les céréales, malgré les hausses tarifaires en Asie et les tensions commerciales. La demande d’origines européennes pourrait être favorisée si les relations France-Algérie se réchauffent davantage, facilitant les débouchés sur l’Afrique du Nord.

3. Réduction des stocks de fin de campagne

Les dernières estimations de StoneX font état de stocks mondiaux de blé en baisse (287,10 Mt contre 288,90 Mt en mars selon l’USDA), tout comme les stocks américains (803 Mbu contre 819 Mbu en mars). Ce recul des réserves disponibles à l’échelle mondiale indique une offre plus tendue qu’anticipé et pourrait inciter les acheteurs à renforcer leurs positions à moyen terme. Cela joue en soutien des prix sur les marchés à terme.

📉 Facteurs baissiers

1. Repli marqué des exportations européennes

Selon la Commission européenne, les exportations de blé tendre de l’UE atteignent seulement 16,36 MMT au 6 avril 2025, contre 24,96 MMT un an plus tôt. Ce recul de 8,6 MMT traduit une perte de compétitivité sur les marchés mondiaux, probablement liée à la concurrence accrue du bassin mer Noire, à la volatilité de l’euro et aux incertitudes douanières. Ce manque de dynamisme sur les débouchés extérieurs pèse sur le potentiel haussier des cours européens.

2. Bonnes conditions des cultures US

Aux États-Unis, le rapport USDA indique que 48 % des surfaces de blé d’hiver sont notées « bonnes à excellentes », un niveau supérieur aux attentes des analystes (même si inférieur à 2024 à la même date – 56 %). Cette performance pourrait augurer d’une récolte correcte, voire abondante, aux USA, ce qui exercerait une pression sur les prix mondiaux, notamment si la demande asiatique s’oriente vers l’origine américaine.

3. Incertitudes liées à la guerre commerciale

La montée en intensité de la guerre commerciale, avec des annonces de droits de douane croisés entre les États-Unis, la Chine et l’Europe, crée un climat d’instabilité sur les échanges agricoles. Le ralentissement de la demande extérieure, redouté par les opérateurs, pourrait freiner les achats internationaux. Cette incertitude pèse particulièrement sur la confiance des marchés, d’autant plus que la publication du rapport USDA sur l’offre et la demande est très attendue ce 10 avril.

💬 Sentiment de marché

Le sentiment de marché sur le blé meunier reste stable cette semaine. Les opérateurs se montrent prudents dans un contexte mêlant signaux contradictoires. D’un côté, les conditions climatiques sèches en Europe et une demande internationale qui persiste apportent du soutien aux prix. De l’autre, les faibles performances à l’export de l’UE et l’abondance relative de l’offre américaine tempèrent les ardeurs.

Le marché semble évoluer dans une zone de consolidation autour de 225 €/t sur l’échéance mai 2025, sans tendance très marquée à la hausse ni à la baisse à court terme. Une percée vers 230 €/t pourrait être envisagée en cas de nouvelles tensions climatiques en Europe ou de surprises haussières dans le rapport USDA. À l’inverse, une détente pourrait ramener les cours vers les 215-218 €/t si les perspectives d’offre mondiale s’améliorent.

Dans l’ensemble, les opérateurs attendent des éléments plus tangibles pour prendre position, notamment les nouvelles projections de production de la Conab au Brésil et le rapport USDA du 10 avril. D’ici là, le marché devrait rester sur des bases solides, mais sans mouvement brusque.

Julien Laurent
Auteur
Julien Laurent

Julien à rejoint Delivagri en 2024.

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